Continuons à déconstruire les idées reçues sur la chaussure et montrer que cette mauvaise habitude du pied qui pue n’est rien d’autre qu’un choix culturel. La Nouvelle-Zélande va m’aider à exploser quelques lourds préjugés.
La Nouvelle-Zélande est un pays riche, peuplé en majorité d’Occidentaux, de descendants d’Européens, chrétien à 55%, et avec des hivers aussi terribles que ceux de Nice, San Francisco ou Lisbonne. Toutes les conditions semblaient donc réunies pour voir émerger une tyrannie des Chaussés sur les Autres. Et pourtant non, rien de tel, le pied nu ne semble pas déranger grand monde au pays des Kiwis. On le retrouve chez les jeunes comme chez les vieux, à la ville comme à la campagne, dans les rues propres, dans les rues sales, à l’intérieur comme à l’extérieur, en hiver comme en été, sous la pluie comme en plein soleil, chez les Maoris comme chez les Blancs, au MacDo, au supermarché, à l’ambassade, dans le bus scolaire ou à l’université (tous ces exemples sont sourcés, je n’invente rien). Il n’est pas majoritaire, mais le pied nu est là et ne choque personne.
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A l’école
Certaines écoles interdisent le port de la chaussure à l’intérieur de l’établissement. Dans d’autres, le règlement ne dit rien et chacun fait comme il veut. Les mômes apprennent le rugby sans chaussure. Sur son blog, un père californien vivant à Auckland depuis un an s’étonne de la chose et fait la remarque suivante : « les enfants se rendent à l’école sans chaussure. Ils traversent la rue ensemble (il n’y a pas de passages piétons), ils galopent et ils sautent sans protection à leurs pieds. Il n’y a pas de danger sous le pied, et pas plus de raison de s’emmerder avec des chaussures »
Sa conclusion rejoint les miennes sur le pied nu et la confiance en soi :
« des parents qui ne s’inquiètent pas élèvent des enfants qui ne s’inquiètent pas. Les enfants qui ne s’inquiètent pas deviennent des adultes qui ne s’inquiètent pas. C’est un cercle vertueux qui en Nouvelle Zélande commence par le pied nu »
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De la course à pied
Il existe une compétition de course à pied qui s’appelle le 24 heures. Il s’agit de courir la distance la plus longue possible en l’espace d’une journée. La dernière édition néozélandaise a eu lieu le 5 octobre 2013. Le vainqueur a parcouru 211,5 km (oui oui) sans chaussure (non non). Le mec n’est pas Noir, ni Maori, ni pauvre, des fois il court avec, des fois il court sans, selon les objectifs, selon les spécificités de la course. Courir pieds nus lui permet de renforcer les muscles de ses pieds et avoir des jambes plus solides.
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Du débat public
Il arrive que la question du pied libre apparaisse dans le débat national, notamment quand des étrangers viennent s’en mêler. En 2006, l’Américaine Erin Mackie et maitre de conférence dans une université néozélandaise publie une sympathique chronique dans l’hebdomadaire NZ Listener. Selon elle, l’habitude du pied-nu relèverait d’une incompréhension de l’hygiène publique.
« Que les Néozélandais aillent nu-pied si souvent dans l’espace public est l’une des quelques habitudes ici qui semblent non seulement arriérées et non-civilisées, mais également non-hygiéniques et repoussantes pour les Nord-Américains«
Les réponses ne tardèrent pas, certains répondirent que la chaussure n’est que le symbole de la déresponsabilisation américaine, une protection pour éviter d’absurdes procès en cas de blessure, d’autres expliquèrent qu’une chaussure qui pue est bien plus sale qu’un pied lavé quotidiennement, d’autres suggérèrent que les allergies galopantes dans les pays du Nord viendraient d’un mode de vie aseptisé et déconnecté du sol. Je suis d’accord avec à peu près tout.
l’absurdité n’est pas d’y aller pieds-nus, l’absurdité c’est d’y aller
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S’affranchir
Il reste que je n’arrive pas à expliquer par quels mécanismes les Kiwis, fils de l’Europe, ont su s’affranchir du poids symbolique de la chaussure ainsi que de la parano d’un sol ennemi et mortel. Certes les Maoris allaient nu-pied à l’époque de la colonisation, mais pourquoi les Blancs n’ont-ils pas considéré cette liberté comme une marque d’animalité honteuse comme ils l’avaient fait déjà à bien des endroits sur le reste de la planète ?
Ça ressemble au paradis du barefoot, la Nouvelle-Zélande. Dommage que les billets d’avion vers là-bas soient à un tarif rédhibitoire j’en aurais bien fait la destination de mes prochaines vacances.
Quant à l’amalgame déplacement à pied = chaussure, c’est une tâche herculéenne qui nous attend si on veut changer ça. Pas plus tard que dimanche dernier pendant ma sortie longue dominicale (pieds nus as usual), une voiture s’arrête à ma hauteur. Le conducteur baisse la vitre et m’interroge d’un air inquiet « Y a un problème monsieur ? » Je lui réponds en souriant que non, tout va bien, et il reprend sa route.
héhé !
merci de ta participation ici.
le coup du mec dans son gros 4×4 qui s’arrête pour te dire que tu es dans l’erreur m’est déjà arrivé trois fois, c’est tout juste incompréhensible ! cette histoire de la chaussure me fait vraiment comprendre combien le monde est fou.
en compète il ya de tout, les curieux, les blagueurs, et ceux qui se sentent insultés, et ça c’est rigolo au début mais après ça devient lourd. après la ligne d’arrivée un gars de 22 piges en minimalistes m’a demandé des conseils pour passer pieds nus, ça ça fait plaisir !
T’es très fort : c’était effectivement un gros 4×4 !
Quant aux autres coureurs, oui ce sont souvent parmi eux que l’on rencontre les plus virulents. À ce propos j’aime beaucoup le chapitre de « The Barefoot Running Book » où Robillard décrit les 4 types de personnes qu’on est amenés à rencontrer et suggère comment réagir. Si tu n’as pas encore lu ce bouquin, il vaut largement le détour (pour peu qu’on lise l’anglais, mais t’as l’air à l’aise dans la langue de Shakespeare).
pareil pour les slips ! ?
les mecs sans slip c’est en Ecosse je crois